L’entreprise verte de demain sera agile, inclusive, innovante et performante.
Thomas Corre, Consultant énergie, environnement
Être verte ou ne plus être ? Telle est la question que toutes les entreprises seront amenées à se poser, à plus ou moins brève échéance, face aux nouveaux défis de la décarbonation. Tour d’horizon des risques auxquels les organisations sont confrontées et des opportunités qui s’offrent à elles dans le contexte de la crise climatique et géopolitique.
Des risques de dévalorisation, de perte d’attractivité et d’isolement
Toute entreprise qui n’engagerait pas son cœur de business dans une dynamique de croissance durable s’expose à des risques divers qui pourraient la conduire à disparaitre.
- Un risque financier majeur face à l’augmentation du coût carbone. Le marché du carbone, en vigueur sur certaines régions (la zone Europe, les Etats-Unis, certains pays asiatiques, déjà quelques pays du continent africain, l’Afrique du Sud), va continuer de s’étendre géographiquement. D’autre part, ce mécanisme d’échanges d’émissions de GES auquel sont aujourd’hui soumises les entreprises les plus polluantes, concernera demain toujours plus d’organisations, comme, d’ailleurs la fiscalité carbone sur lesquelles les entreprises seront très attendues. Appliquée aux seules énergies fossiles, la taxe carbone sera progressivement intégrée à d’autres produits et services. Une entreprise qui ne se positionnerait pas rapidement sur ces sujets pourrait voir ses OPEX augmenter de façon drastique.
- Des difficultés à trouver des fonds pour financer son développement. La réglementation européenne « Taxonomie verte » est en train d’encadrer le marché de la finance durable. Elle réoriente les flux financiers afin d’accélérer la transition énergétique. Elle définit, à l’intention des investisseurs, six critères harmonisés pour déterminer si l’activité d’une organisation est environnementalement durable : l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique, l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines, la transition vers une économie circulaire, le contrôle de la pollution, la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. Toute entreprise devra répondre à l’un de ces six critères et ne pas agir négativement sur les cinq autres. Elle le démontrera en publiant les indicateurs de la Taxonomie verte dans sa DPEF.
Cette Taxonomie verte s’appuie sur de nouveaux outils de financement tels les « green bonds » (obligations vertes), émis par de grands bailleurs de fonds (Banque Européenne d‘Investissement, Banque mondiale, Etats…). Seuls les projets ayant un impact favorable sur l’environnement sont éligibles et ils sont conditionnés à la publication annuelle d’un rapport rendant compte aux investisseurs de leurvie. - Un risque de perte d’attractivité en externe et en interne. Une entreprise en bonne santé économique et sociale s’appuie sur des clients satisfaits, des salariés engagés et des partenaires solides. Aujourd’hui, l’engagement environnemental d’une organisation est devenu un critère de choix prépondérant pour tous : clients, jeunes diplômés, partenaires. Même si elle est bien installée dans l’écosystème, l’entreprise qui tarderait à s’engager dans une croissance durable risque de perdre la confiance de ses clients face à l’arrivée sur le marché de concurrents très vertueux sur la dimension environnementale.
Elle pourrait voir partir ses salariés, rencontrer des difficultés pour attirer de jeunes talents et pour garantir la pérennité des compétences au sein de l’entreprise.
Elle pourrait perdre ses fournisseurs et partenaires, soumis aux mêmes enjeux de décarbonation qu’elle. Ne pas s’engager à leurs côtés, alors même que l’entreprise doit prendre en compte le calcul du bilan carbone des activités de ses partenaires dans son propre calcul d’empreinte, serait très pénalisant pour les partenaires. - Une perte de rentabilité. L’augmentation récente et exponentielle des coûts de l’énergie impacte fortement la rentabilité de certaines activités. En Afrique notamment, elle peut mettre à mal des modèles d’affaires et réduire significativement les bénéfices sur certaines activités. Travailler à la réduction de son empreinte carbone en se focalisant sur le volet réduction de la consommation d’énergie est donc indispensable pour sécuriser certaines activités.
Que sera l’entreprise de demain ?
L’entreprise de demain sera capable de concilier une croissance économique avec un respect de l’environnement et de la biodiversité dans chacune de ses activités.
Elle saura faire évoluer rapidement ses modèles d’affaires pour faire du changement climatique non pas une contrainte, mais une opportunité de développement.
Elle se donnera les moyens de se hisser au niveau des nouveaux acteurs, environnementalement vertueux, du marché et de l’écosystème, en intégrant les critères de la Taxonomie verte qui lui permettront de continuer à financer sa croissance.
Elle aura une connaissance fine et approfondie de son empreinte environnementale sur l’ensemble de ses activités pour assurer un développement durable de son business.
Elle sera force de proposition pour concilier une croissance économique et sociale avec une réduction de son empreinte environnementale : elle expérimentera de nouveaux modèles d’affaires, de nouveaux modes de fonctionnement, de nouvelles façons de travailler en interne et en externe. Elle s’appuiera notamment sur les initiatives de ses collaborateurs et l’intelligence collective, sources d’innovation et de progrès. L’engagement des salariés dans la Fresque du climat au sein de nombreuses entreprises est la meilleure démonstration de leur motivation. Cette démarche aiguise la prise de conscience collective et la compréhension d’un défi partagé. Elle incite les collaborateurs à devenir formateurs de leurs collègues pour embarquer le plus grand nombre sur ce sujet.
L’entreprise verte de demain sera agile, inclusive, innovante et performante.